Dai diamanti non nasce niente. .

Attendant le bus 29 nous tombons sur un petit homme à casquette. Dans un espagnol mal assuré nous lui demandons:
– C’est bien la direction de La Boca ici? Il nous répond que oui mais qu’avec la manifestation les bus sont bloqués. Il faut patienter car peut-être un bus va passer. . Il a envie de parler. Surtout dans sa langue maternelle. Nous remarquons cette lueur dans ses yeux, des souvenirs doivent lui remonter à l’esprit. Il souffle un coup, il se lance. Il parle bien. C’est un genre d’itagnol ou d’espalien! Son père envoyé à la guerre en Afrique où il a contracté une maladie pulmonaire. Un retour au Pays sous le régime fasciste et la pauvreté qui le pousse à l’exode. Sa destination première le Venezuela mais le passeur lui demanda trop d’argent et le climat tropical mauvais pour la maladie qu’il avait contractée plus jeune l’amène à choisir comme destination finale l’Argentine. Buenos Aires, plus précisément. Il vient de Salerno, originaire de là-bas. Il s’appelle José.
-J’ai été en Italie. Quand j’ai vu ma ville, j’ai pleuré. Mais l’Italie c’est le vieux, l’ancien comme la Grèce, le Colisée, le Vatican. Ici c’est le nouveau. J’aime bien, je préfère. C’est mieux. Je n’aime pas le vieux.
C’est à ce moment là qu’un autre Monsieur s’approche et il nous demande si ça fait longtemps qu’on attend le bus 29.
– Oui, ça fait longtemps. On lui répond. Yeux clairs, bleus, canne à la main, tous les cheveux sur la tête, gris. Il s’unit au monologue de José. Ils sont fiers du mélange de cultures qui ont fait la particularité de leur Pays. Il nous dit être d’origine lettonne. Jorge Ivanovitch. Encantados. Son nom nous fait penser à un personnage d’un roman de Dostoïevski. Nous l’étudions pour mieux y associer ses mots. Nous l’écoutons parler, nous avons envie de savoir plus de sa vie, de ses idées, de ses connaissances d’homme d’autrefois. Ses grand parents ont fui le régime soviétique et du côté de sa mère sont espagnols. Ils font des plaisanteries que nous ne comprenons pas, mais nous esquissons tout de même un sourire. Le bus n’arrive pas à cause d’une manifestation sous l’Obélisque.
C’est la deuxième que l’on voit en deux jours. La veille sur la plaza de Mayo. Jorge nous dit qu’il s’agit sûrement de syndicalistes. Peut-être ils manifestent à cause de la fermeture d’une usine ou pour la baisse des salaires ou qui sait encore pourquoi. . . José continue de faire la comparaison entre l’Italie et l’Argentine comme pour se rassurer d’avoir fini dans le meilleur des deux. Mais à force de le répéter on dirait qu’il ne sait pas s’il a été chanceux d’avoir  grandi en Argentine ou s’il aurait été plus heureux en Italie!
– Là-bas vous avez le tourisme, mais pas les usines comme en Argentine. Elles sont mieux ici. José se rattrape!

Nous nous rendons compte que les bus sont détournés. José nous propose d’aller à l’autre bout de la place pour avoir plus de chance d’en attraper un. Nous disons au revoir à Jorge. Le bus viendra à lui, probablement. Avec sa canne, il ne peut pas marcher davantage. Il nous souhaite mucha suerte  pour notre voyage ! Nous sommes frappés par la capacité des porteños à attendre. A Buenos Aires dans les commerces, les arrêts de bus, les banques, des queues se forment. Les gens sont habitués ! Mais ce n’est pas notre cas!
José s’est donné pour mission de nous accompagner. Nous avançons tous les trois Avenida Corrientes. Entretemps il continue sa narration. Même si nous marchons et l’ambiance tout autour est chaotique, quelque part, nous nous sentons comme figés dans le temps. Complètement captivés par la narration de José. A cet endroit, il y a plus de monde. Nous avons sûrement plus de chance d’avoir un bus. Quelques minutes plus tard, un contrôleur nous conseille de nous avancer dans une petite ruelle, car à cause de la manifestation les bus ne vont pas suivre leur route habituelle. José nous guide dans la ruelle. Les voitures s’entassent, le gaz d’échappement est insupportable. L’air pollué. Nous arrêtons au moins trois ou quatre bus 29 à des endroits différents de la rue, mais aucun ne nous prend.

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